Aller au contenu
Accueil » JACQUES BOUVILLE-GARRIC – Maître artisan en Métier d’Art – Relieur

JACQUES BOUVILLE-GARRIC – Maître artisan en Métier d’Art – Relieur

La passion des livres en héritage

Jacques BOUVILLE-GARRIC : Maître artisan en Métier d’Art – Relieur, doreur et restaurateur de livres anciens


Arrivée à proximité du 11 rue de Fermat à Toulouse mon œil est tout de suite attiré par les deux noms inscrits en lettres anciennes sur la devanture. On peut y lire : GARRIC-BOUVILLE.

Un hommage aux parents de ce Maître artisan, qui ont fondé cet atelier de reliure en 1938. Un lieu chargé d’histoire où presses manuelles, cousoirs, papier ébru et piles de livres en attente d’une 2nde vie cohabitent.

Un espace au sein duquel Jacques et sa femme, Marie-Isabelle, font perdurer les savoir-faire propres à l’art de la reliure.


Tout d’abord commençons par un petit peu d’histoire.

C’est au IIème siècle que la reliure a vu le jour, avec le codex. Ce terme «codex» désigne un livre constitué d’un ensemble de feuilles pliées formant des cahiers, qui étaient ensuite reliés. C’est via le travail d’assemblage que l’on distinguait le livre en volume (tel que nous le connaissons aujourd’hui) avec le livre dit « en rouleau ».

Un savoir-faire qui a évolué avec le temps au gré de l’évolution des relations que nous entretenons avec ces objets du quotidien. Des objets (dont rappelons-le, la vocation première était de compiler des écrits), où l’esthétisme a su se faire une place de choix grâce notamment au travail manuel des relieurs (autrefois nommés « ligator » qui signifie « le lieur »).


Marie-Isabelle, Jacques, quelle est l’histoire de cet atelier où nous sommes aujourd’hui ?

J.B-G : cet atelier de reliure a été fondé par mon père en 1938. Ma mère était à l’époque son élève relieuse puis elle est devenue son associée et épouse, d’où les deux noms sur la devanture de l’atelier.

M-I.P-B : et nous avons reproduit sans le vouloir le même schéma. J’étais également élève relieuse de Jacques avant de devenir sa femme et de travailler avec lui.

J.B-G : c’est vrai. Sans le vouloir les choses se sont passées de la même façon. Aujourd’hui, j’exerce dans l’atelier familial où j’ai passé la majeure partie de mon enfance et dont j’ai repris naturellement le flambeau en 1971.

Façade de l'atelier GARRIC-BOUVILLE à Toulouse.
Et voici l’atelier familial créé en 1938 à Toulouse.

Pour vous quels qualités/traits de caractère doit-on avoir pour exercer le métier de relieur ?

M-I.P-B : ce métier requiert de la minutie et de la rigueur. C’est aussi un métier physique. Ici, on « maltraite » les livres. On les tape, on les ponce, on en déplace des piles à longueur de journée, il faut donc avoir de la force.

J.B-G : pour exercer ce métier comme dans beaucoup de métiers d’art, c’est la passion qui nous anime. Travailler en tant que relieur nécessite aussi d’avoir l’amour du geste précis. La reliure comporte un nombre important de gestes métier à respecter où la précision et la patience sont de pair.

Jacques en pleine phase de dorure.
Etape de dorure par Jacques.

En parlant de gestes métier, quelles sont les étapes d’une reliure ?

M-I.P-B : Il existe trois grandes étapes :

1. Tout d’abord, il y a la préparation du corps d’ouvrage. On désunit ce que l’on appelle les cahiers afin de repartir de zéro. Dans cette 1ère étape nous allons totalement démonter l’objet, le nettoyer et réparer ce qui doit l’être (comme des pages déchirées ou tâchées par exemple).

2. Une fois les pages remises en état, nous passons à la phase de couture où nous allons en amont grecquer les feuilles (le terme « grequer » représente le fait de réaliser des entailles sur le dos d’un livre). Une fois l’œuvre grecquée, nous passons à la couture afin de lier l’ensemble des cahiers. Cette phase se réalise sur un cousoir, qui est un outil en bois traditionnel.

3. Pour finir, la phase finale : la couvrure. Cette dernière partie va être dédiée à la finition de l’ouvrage. Du choix de sa couverture en papier ébru par exemple jusqu’à sa décoration par dorure à la feuille d’or. Au total, chaque projet peut comporter facilement plus de 60 gestes métier.

Les phases de restauration d'un ouvrage.
Plaçure, couture, couvrure,… voici quelques unes des étapes clés de la restauration d’un ouvrage.

Waouh cela fait beaucoup pour un seul ouvrage ! Et qu’est-ce qui vous anime à faire ce métier ?

M-I.P-B : nous partageons l’amour des livres tout d’abord. Pour ma part, ce que j’aime dans le métier de relieur, c’est qu’il est dynamique. Chaque projet est unique, nous sommes donc constamment dans la nouveauté !

Pour moi, redonner une seconde vie à des livres est vecteur de temps qui passe. C’est un peu comme un voyage dans le passé. Nous devons nous remettre à la place du relieur de l’époque pour comprendre la technique qu’il a utilisé afin de réussir à rester le plus fidèle à son travail et aux traditions artisanales ancrées dans la tradition du livre. C’est comme faire des voyages permanents dans le passé. Exercer le métier de relieur est pour moi comme exercer un métier hors du temps où on l’on fait sans cesse des allers-retours dans le passé.

J.B-G : en ce qui me concerne j’apprécie le fait que chaque projet soit unique. C’est vraiment du cas par cas où la capacité d’adaptation est de mise. Qu’il s’agisse de livres précieux ou bien de livres ordinaires à valeur sentimentale, j’aborde chaque projet avec autant d’intérêt et d’engouement.

A mes yeux notre savoir-faire est synonyme de protection et de transmission du patrimoine culturel.

Les fidèles outils du relieur.


Justement en parlant de transmission, l’Atelier GARRIC-BOUVILLE propose des formations au métier de relieur. Qu’en est-il exactement ?

J.B-G : nous sommes effectivement Centre de Formation. Nous formons des apprentis dans le cadre du CAP « Arts de la Reliure » qui comprend divers apprentissages tels que : la reliure ; l’histoire du livre ; l’ornementation ; la dorure ; …

En plus d’accompagner à la préparation de ce diplôme, nous accompagnons également les personnes au passage du Brevet des Métiers d’Art.

Outre ces formations diplômantes, nous avons plaisir à accueillir toute personne ayant un projet de reliure et/ou de restauration, dans le cadre de formations « loisirs ». Nous sommes là vraiment sur des stages sur-mesure en fonction des projets de chacun. Cela peut aller de la création d’un carnet de voyage à la restauration d’un livre en passant par la création de A à Z d’un album photos.

Chacun vient avec son projet personnel. Aucun prérequis n’est nécessaire. Lors de ces stages, nous accompagnons pas à pas tant sur la partie reliure, cartonnage, restauration que dorure.


Des savoir-faire métier complémentaires et spécifiques à votre profession et dont Jacques, vous maitrisez chaque aspects telle la dorure.

J.B-G : il est vrai que j’ai cette approche du livre à 360° si l’on peut dire. Ici, nos clients ont une proposition artistique globale puisque nous intervenons tant sur la reliure, la restauration que sur la dorure à la feuille d’or.

Phase de dorure de la couverture d'un livre.
La touche finale : la dorure !

Concernant vos clients, qui sont-ils justement ?

J.B-G : nous travaillons principalement avec des administrations et des tribunaux. Toutefois, notre clientèle est aujourd’hui constituée d’un grand nombre de particuliers qui souhaitent conserver et/ou transmettre ces beaux objets que sont les livres.

_ _ _ _ _


Envie d’en apprendre plus sur le métier de relieur ? C’est par ici !


Crédits photos :
©Atelier BOUVILLE-GARRIC
©JP CLUSET